LE REVIZOR 13
Le préfet. — Vous vous fourrez tous les deux le doigt dans l'œil.
Le directeur des postes. — Je vous jure que c'est la guerre avec la Turquie... toujours les Fran- çais gâtent tout !
Le préfet. — Vous m'amusez avec votre guerre... C'est nous qui écoperons et pas les Turcs... Je le sais, j'ai une lettre.
Le directeur des postes. — Si vous en êtes sûr... évidemment, il n'y aura pas de guerre avec la Turquie.
Le préfet. — Alors, Ivan Kouzmitch, que pensez- vous de cette visite?
Le directeur des postes. — Mon opinion importe peu... Mais qu'en dites- vous, vous, Antone Anto- novitch?
Le préfet. — Moi? Je ne crains rien... mais j'avoue que... les marchands et les bourgeois m'intimident... On dit qu'ils me détestent... en toute franchise, si je ne me suis pas gêné avec eux, c'est sans aucune haine... je pense même (il prend le directeur des postes par le bras et s' écartant un peu)... je me demande s'il n'y a pas eu de plainte portée contre moi... Pour- quoi diable, en effet, le révizor viendrait-il? Écoutez- moi, Ivan Kouzmitch : ne pourriez-vous, pour notre bien à tous... toute lettre qui vous arrive et qui part... Vous comprenez... Comment dire?... la déca- cheter légèrement et la parcourir... Nous verrons s'il y a plainte ou simple correspondance... puis on la cachette à nouveau... D'ailleurs... vous savez fort bien qu'on peut remettre la lettre décachetée...
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