Page:Gogol - Les Âmes mortes, tome 1, trad Charrière, 1859.djvu/56

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CHANT II.

LA FAMILLE MANÎLOF.


Tchitchikof fait atteler pour aller voir Manîlof, qui lui a dit demeurer à quinze kilomètres de la ville. — Pétrouchka reste préposé à la garde des effets. — Portrait de Pétrouchka ; l’auteur s’excuse de présenter au public dédaigneux de Russie le laquais et le cocher d’un héros qui lui-même n’est ni prince, ni comte, ni baron ni même général. — Tchitchikof franchit la barrière de la ville et une distance de quinze verstes, puis une seizième verste. — Là un paysan est interrogé sur le village nommé Manilovka. — Après une demi-douzaine de verstes encore, Tchitchikof arrive enfin. — Description des localités. — Joie de Manîlof voyant venir une visite quelconque, puis reconnaissant Tchitchikof. — Insignifiance impatientante de certains personnages. — Portrait de Manîlof, en qui on voudrait voir une passion, une manie, un vice, afin de savoir de lui quelque chose. — Mme Manîlof est bien la femme de son mari, et tous deux sont bien les père et mère des petits Manîlof. — Manières cérémonieuses du couple sentimental. — Trio de louanges données sans restriction à toutes les notabilités de la ville. — Recrudescence de compliments mutuels. — La salle à manger, les enfants, leur gouverneur. — Manîlof fait briller à table l’instruction de ses héritiers. — Thémistoclus mord Alcide à l’oreille. — Manîlof, après le dîner, emmène son convive dans sa petite tabagie, qu’il nomme son cabinet. — Tchitchikof, qui ne fume pas, se prête aux propos bucoliques et sentimentalistes de son amphitryon et en fait une transition pour savoir s’il est mort beaucoup de monde dans le village depuis le dernier cens. — L’intendant en apporte la liste. — Caractère et position de cet homme. — Tchitchikof veut avoir ces âmes mortes ; Manîlof craint un moment que son convive ne soit fou, puis il se rassure, revient aux propos idylliques, il promet d’aller à la ville, au premier jour, passer l’acte de vente de ses morts, et reçoit les tendres adieux de son ami. — Mme Manîlof et les deux jeunes savants au moment du départ. — Il est promis des joujoux. — Derniers efforts faits pour retenir l’aimable visiteur. Tchitchikof part. — Il y a de l’orage dans l’air. — Manîlof, toujours rêveur, rêve ce soir-là plus rêveusement que jamais ; une seule question l’interloque : « À quoi bon acquérir des âmes mortes ? »


Il y avait déjà plus d’une semaine que le voyageur était dans la ville, allant à toutes les soirées et à tous les dîners, et passant son temps, comme on dit, très-agréablement. À la fin, il se décida à étendre le cours de ses visites