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Page:Gogol - Nouvelles choisies Hachette - Viardot, 1853.djvu/60

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si tranquille qu’on s’oublie avec eux, pour un instant, et qu’on est prêt à penser que les passions, les vains désirs, tous les enfants du malin esprit qui troublent le monde, n’existent point, et qu’ils ne vous sont apparus que dans un songe pénible et agité. Je vois d’ici la petite maison, entourée d’une galerie que soutiennent de minces colonnettes en bois noirci, et qui fait le tour entier du bâtiment, afin qu’on puisse, pendant l’orage, fermer les volets des fenêtres sans être mouillé par la pluie ; derrière la maison, des mûriers en fleur, puis de longues rangées de petits arbres fruitiers noyés dans le vif écarlate des cerises et dans une mer bleuâtre de prunes au duvet plombé ; puis un large et vieux hêtre, sous l’ombre duquel est étendu un tapis pour le repos ; devant la maison, une cour spacieuse avec une herbe courte et verdoyante, avec deux petits sentiers qui conduisent de la grange à la cuisine, et de la cuisine au logis du seigneur ; une oie au long cou, qui boit de l’eau dans une flaque, entourée de ses oisillons, d’un jaune tendre et soyeux ; une longue baie, à laquelle pendent des liasses de poires et de pommes séchées, et des tapis mis à l’air ; un chariot chargé de melons, près de la grange ; à côté, un bœuf dételé et ruminant, paresseusement couché. Tout cela a pour moi un charme inexprimable ; peut-être parce que je n’en aurai plus jamais le spectacle, et