Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/123

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Le juif Yankel était devant lui.

— Seigneur polkovnik, seigneur polkovnik, disait il d’une voix brève et entrecoupée, comme s’il voulait lui faire part d’une nouvelle importante, j’ai été dans la ville, seigneur polkovnik.

Tarass regarda le juif d’un air ébahi :

— Qui diable t’a mené là ?

— Je vais vous le raconter, dit Yankel. Dès que j’entendis du bruit au lever du soleil et que les Cosaques tirèrent des coups de fusil, je pris mon caftan, et, sans le mettre, je me mis à courir. Ce n’est qu’en route que je passai les manches ; car je voulais savoir moi-même la cause de ce bruit, et pourquoi les Cosaques tiraient de si bonne heure. J’arrivai aux portes de la ville au moment où entrait la queue du convoi. Je regarde, et que vois-je l’officier Galandowitch. C’est un homme que je connais ; il me doit cent ducats depuis trois ans. Et moi, je me mis à le suivre comme pour réclamer ma créance, et voilà comment je suis entré dans la ville.

— Eh quoi ! tu es entré dans la ville, et tu voulais encore lui faire payer sa dette ? lui dit Boulba. Comment donc ne t’a-t-il pas fait pendre comme un chien ?

— Certes, il voulait me faire pendre, répondit le juif ; ses gens m’avaient déjà passé la corde au cou. Mais je me mis à supplier le seigneur ; je lui