Page:Gogol - Tarass Boulba, Hachette, 1882.djvu/142

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être touché par la beauté de cette femme ; il l’aurait traînée par ses longs cheveux à travers tout le camp des Cosaques ; il aurait meurtri et souillé ses belles épaules, aussi blanches que la neige éternelle qui couvre le sommet des hautes montagnes ; il aurait mis en pièces son beau corps. Mais Boulba ne savait pas lui-même ce que Dieu lui préparait pour le lendemain… Il finit par s’endormir, tandis que la garde, vigilante et sobre, se tint toute la nuit près des feux, regardant avec attention de tous côtés dans les ténèbres.


Le soleil n’était pas encore arrivé à la moitié de sa course dans le ciel, que tous les Zaporogues se réunissaient en assemblée. De la setch était venue la terrible nouvelle que les Tatars, pendant l’absence des Cosaques, l’avaient entièrement pillée, qu’ils avaient déterré le trésor que les Cosaques conservaient mystérieusement sous la terre ; qu’ils avaient massacré ou fait prisonniers tous ceux qui restaient, et qu’emmenant tous les troupeaux, tous les haras, ils s’étaient dirigés en droite ligne sur Pérékop. Un seul Cosaque, Maxime Golodoukha, s’était échappé en route des mains des Tatars ; il avait poignardé le mirza, enlevé son sac rempli de sequins, et, sur un cheval tatar, en habits tatars, il