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Page:Goldenweiser - Le Crime comme peine, la peine comme crime.djvu/81

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L’épisode de l’officier et du condamné portant dans ses bras sa petite-fille dont la mère était morte du typhus à Tomsk, peut servir d’exemple au plus grand manque de retenue mais à la plus grande condescendance aussi des autorités inférieures.

« L’excuse du condamné qu’il ne pouvait pas porter l’enfant, ayant aux mains des menottes, irrita l’officier qui était de mauvaise humeur et il frappa le condamné qui ne s’était pas soumis de suite. En face de ce dernier se tenaient un soldat et un condamné trapu et barbu, une menotte attachée à une seule main, qui jetait en dessous de sombres regards, tantôt sur l’officier tantôt sur le condamné et la petite fille. Un murmure de plus en plus fort montait du groupe des détenus.

— Quand nous allions de Tomsk on ne nous mettait pas de menottes, se fit entendre une voix enrouée partant des derniers rangs.

— Où doit-il donc laisser la fillette ? Ce n’est pas une loi, ça ! dit encore quelqu’un. L’officier se jeta sur le groupe comme s’il venait d’être mordu. Qu’est-ce encore ? hurla-t-il, je te la montrerai, la loi. Qu’est-ce qui a dit ça ? Toi ? toi ?

— Tous le disent, parce que… commença le prisonnier trapu. Il n’eût pas le temps d’achever : l’officier de ses deux mains venait de le frapper au visage.

— Vous vous révoltez ? Je vous apprendrai à vous rebiffer. Je vous ferai tous fusiller comme