Aller au contenu

Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
165
Comédie.

Paméla[1].

Que le ciel vous récompense de tout le bien que vous m’avez fait : daignez me pardonner les déplaisirs que j’ai pu vous causer, et souvenez-vous quelquefois de moi. (Elle lui baise la main qu’elle baigne de ses larmes.)

Bonfil (témoigne son trouble ; il sent sa main arrosée de pleurs.)

Ah, Paméla ! tes pleurs coulent sur ma main.

Paméla.

Hélas ! pardon. Ce sera quelques larmes tombées sans m’en être apperçue.

Bonfil[2].

Essuie-moi cette main.

Paméla.

Monsieur……

Mme Jeffre (à Pamela.)

Allons, qu’est-ce que cela vous coûtera ? Essuyez-lui la main.

Paméla (essuie la main de Mylord avec son tablier.)
Bonfil.

Ingrate !

Paméla.

Pourquoi, Mylord, me traitez vous ainsi ?

  1. Hélas ! je ne sais pas ce que je deviendrai :
    De vos bontés toujours je me ressouviendrai,
    Mon repos aujourd’hui veut un grand sacrifice.
    Croyez qu’il n’en est point que pour vous je ne fisse…
    Puisse le juste ciel, couronnant vos vertus,
    Vous payer les bienfaits que de vous j’ai reçus,
    Mylord ! et si jamais Paméla vous fut chère,
    Ah ! joignez sa mémoire à celle d’une mère !

    Bonfil.

    Paméla ! sur ma main je sens couler tes pleurs !

    Paméla.

    Hélas ! un nom si cher réveille mes douleurs ;
    Pardon, Mylord ! etc.

    (Acte III, Sc. XIV.)
  2. Bonfil exigeant que Pamela lui essuie la main, et Paméla se rendant à sa demande ne seraient point tolérés sur le théâtre français. Moins sévère que nous, les étrangers se permettent une foule de choses contre la vraisemblance ou les bienséances théâtrales, dont la plus légère suffirait, parmi nous, pour faire tomber un ouvrage d’ailleurs estimable.