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Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/284

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Comédie.

Andreuss.

Comment cela ? J’entends la conduire chez moi avec toute la convenance possible.

Bonfil.

Restez ici quelques jours.

Andreuss.

Mon épouse m’attend.

Bonfil.

Vous partirez quand je vous le dirai.

Andreuss.

Voilà déjà deux jours d’absence ; si j’en employe deux encore à mon retour, ce sera trop pour moi.

Bonfil.

Je ne mérite pas que vous me traitiez avec cette rigueur.

Andreuss.

Monsieur…

Bonfil.

Ne me répliquez point. Vous partirez quand je voudrai.

Andreuss[1].

Ces cheveux blancs peuvent-ils se flatter d’obtenir de vous la grace de parler franchement ?

  1. Andreuss.

    Ces cheveux blancs, Mylord, ont-ils le privilége
    D’excuser à vos yeux la libre vérité ?

    Bonfil.

    Oui ; je fais cas sur-tout de la sincérité.

    Andreuss.

    Ah ! Mylord, je vois trop qu’il ne reste aucun doute
    Sur ce que je craignais, et qu’on m’a dit en route.

    Bonfil.

    Eh ! que vous a-t-on dit ?

    Andreuss.

    Eh ! que vous a-t-on ditQue ma fille est l’objet
    De votre amour.

    Bonfil.

    De votre amour.Souvent on parle sans sujet…
    Quoiqu’il en soit, Andreuss, votre fille est honnête.
    Bien loin de me flatter d’avoir fait sa conquête :
    Je sais qu’elle mourrait avant de consentir
    À rien dont elle dût jamais se repentir.

    Andreuss.

    Ô sage Paméla ! seul trésor de ta mère !
    Cher et dernier espoir de ton malheureux père !
    Que je suis consolé d’apprendre tes vertus !
    Ah ! Mylord, au danger ne l’exposez donc plus.
    Assurez son repos, en daignant me la rendre.
    C’est mon bien, permettez que j’ose le reprendre.

    (Acte IV, Sc. XII.)