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Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/334

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Comédie.

et dont je ne me puis contenter. Oui ; vous m’avez donné un cœur qui méditait et eût effectué ma ruine, si le Ciel ne m’eût prêté son secours bienfaisant. Donnez-moi aujourd’hui le cœur d’un époux fidelle, d’un amant honnête : voilà le plus précieux, le plus cher que vous puissiez m’offrir. Présent rare et précieux que doit un chevalier aussi généreux que vous à une fille malheureuse, mais qui apporte, du moins, en dot une honnêteté à toute épreuve.

Bonfil.

Et tel est aussi, chère épouse, tel est le cœur que je vous offre. Pour l’autre, je l’ai arraché de mon sein dès l’instant que vos refus héroïques m’ont fait rougir de vous l’avoir présenté une fois. Myladi, écoutez, écoutez les sentimens de cette ame si élevée au-dessus du commun. La voilà cette femme vertueuse que vous avez méconnue, que vous avez osé insulter ! La voilà cette estimable fille à qui votre téméraire neveu a prodigué d’exécrables injures !… À compter de ce jour, je vous défends de vous présenter devant moi ; et quant à votre neveu il payera son audace de sa vie.

Myladi.

Appaisez ce courroux, mon frère ; si mon neveu vous a offensé, il est tout disposé à vous en faire ses excuses.

Artur.

Allons, mon cher ami, que des idées de vengeance n’attristent point un si beau jour. Recevez les excuses du chevalier.

Bonfil.

Je les recevrai l’épée à la main.

    Dans des détours obscurs il s’était égaré.
    Celui que je vous offre est sincère et fidèle :
    Le vôtre lui sert de modèle
    Et vos vertus l’ont épuré.

    (Paméla, acte V, Scène dernière.)