Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome I, 1801.djvu/68

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
29
Comédie.

Oh ! que n’est-il placé, comme moi, dans la classe des serviteurs, ou que ne suis-je élevée, comme lui, au rang dans lequel il brille ? Quels vœux hélas, me convient-il de former aujourd’hui ! dois-je lui souhaiter la bassesse de ma condition, ou ambitionner l’éclat de la sienne. Dans le premier cas, je ne rends pas justice à son mérite ; et je deviens, dans le second, coupable d’une ridicule ambition. Ah ! ce n’est pas la vanité du rang qui me ferait désirer… Je sais trop hélas ! je sais trop pourquoi… Qu’ai-je dit, insensée ! je m’abuse à poursuivre de vaines images, des songes qui m’échappent, et je pense à des choses qui me feraient rougir, si l’on pouvait lire dans mon cœur. J’entends quelqu’un, ce sera, sans doute, madame Jeffre. Oh, ciel ! c’est mon maître lui-même.


Scène VI.

BONFIL, PAMÉLA.
Bonfil (à part, en entrant.)


Je meurs d’impatience. (haut) Paméla, avez-vous vu madame Jeffre ?

Paméla.

Je ne l’ai pas vue depuis que je vous ai quitté.

Bonfil.

Elle avait quelque chose à vous dire.

Paméla.

Il n’y a qu’un moment, Monsieur, que j’ai pris congé de vous.

Bonfil.

Dites donc que vous m’avez fui. J’ai oublié de vous dire une chose très-importante.

Paméla.

Souffrez, Monsieur, que j’appelle madame Jeffre.