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COMÉDIE.

de cause, et condamna le chevalier, que tout son esprit de voyageur n’empêchait pas de trembler déjà de tous ses membres. Mylord Artur fit alors un trait vraiment héroïque : Je suis maître de votre vie, dit-il à Ernold ; je vous la donne, et il tire en même temps son pistolet en l’air. Le chevalier ne savait pas au juste s’il était mort ou vivant. Il reste un moment sans parler ; et s’adressant ensuite à mylord Artur : ma foi, dit-il, moi qui ai voyagé, je n’ai vu nulle part encore un plus galant homme que vous. Monsieur se disposoit déjà à se battre avec mylord Artur ; mais le chevalier Ernold lui arrache le pistolet de la main, le tire contre un arbre, fait un saut d’alégresse, et tire ses tablettes de sa poche pour y consigner ce fait mémorable.

Mylord Artur s’est retiré en silence, mylord Bonfil, en pestant bien fort ; et le chevalier est resté au jardin, où il fredonne des airs français.

Paméla.

Grâce au ciel, personne n’a couru de danger.

Myladi.

Où est allé mon frère ?

Longman.

Dans son appartement du rez-de-chaussée.

Myladi.

Je vais le retrouver. (En attitude de partir.)

Paméla.

Vous n’irez pas sans moi. (Elle veut la suivre.)

Myladi.

Arrêtez ; il ne vous est plus permis de le voir.

Paméla.

Je ne verrai plus mon époux ?

Myladi.

Non ; son cœur vous a déjà répudiée, et la loi va bientôt confirmer cet arrêt. (Elle sort.)