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Comédie.

Isabelle.

Me genoux tremblent sous moi.

Moliere.

Qu’avez-vous ?

Isabelle.

Ma mère me suit ; elle est sur mes pas.

Moliere.

Croirons-nous qu’elle s’aperçoive du bien que je vous veux ?

Isabelle.

Je crois bien que vos sentimens peuvent être un mystère pour elle : mais elle découvrira aisément les miens.

Moliere.

Et pourquoi les vôtres plutôt que les miens ?

Isabelle.

C’est que mon affection est bien différente de la vôtre : c’est que je vous aime plus cent fois que vous ne m’aimez ; et que, moins vous aimez, plus il vous est facile de feindre.

Moliere.

Ah ! méchante, méchante ! vous me feriez donner au diable… Je ne crois pas un mot de ce que vous dites-là.

Isabelle.

Mais enfin, vous voyez mon amour ; où sont les preuves du vôtre ? Je m’expose, vous le voyez, pour l’amour de vous, au danger d’être maltraitée. Si vous étiez venu me voir, je ne serais pas ici.

Moliere.

Ah ! combien de fois je volerais respirer un instant auprès de vous, si je ne craignais d’irriter votre mère !