Page:Goldoni - Les chefs d'oeuvres dramatiques, trad du Rivier, Tome II, 1801.djvu/294

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
291
Comédie.

Scène XII.

MOLIERE, ensuite LÉANDRE.
Moliere.


Oui, oui, je me flatte de voir avant peu le courroux de ces dames céder aux conseils de Valere et à la voix de la raison. Mais comment un instant a-t-il pu opérer une pareille révolution dans l’esprit de la mère et de la fille, dans celui même de la servante ? quelque méchant les empoisonne de ses conseils ; quelque vil séducteur les soulève contre moi : mais malheur à lui, si je le découvre ; il se ressouviendra de Moliere.

Léandre.

Mon ami, je vous conseille de jeter votre vin à la rivière. Ah ! je viens d’en boire deux bouteilles, mais deux bouteilles d’un vin qui ferait les délices d’un dieu ! Votre Bourgogne amer, n’est point du tout de mon goût : parlez moi du vin de Champagne que j’ai bu chez un ami ! avec deux petites croûtes de pain salé et grillé, je vous ai sablé deux bouteilles de ce nectar, le plus lestement du monde.

Moliere.

Grand bien vous fasse. (À part.) Oh ! femmes ! femmes endiablées !

Léandre.

Sec, mousseux et blanc… !

Moliere.

Oh ! dieu ! que vous m’excédez !

Léandre.

Eh bien ! ne voilà-t-il pas votre diable d’humeur noire, qui vous rend digne, tout au plus, de vivre