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Comédie.

place dans la maison d’un homme aussi pauvre que moi.

Don Fernand.

Seigneur don Ambroise, vous me feriez vraiment rire !

Don Ambroise.

Dites donc pleurer, si vous connaissiez tout mon malheur. J’ai à peine de quoi vivre et ma très-chère belle-fille, cette tête sans cervelle, veut avoir de la société, un équipage, de la toilette, chocolat, café… Malheureux que je suis ! vous me voyez au désespoir.

Don Fernand.

Mais je ne vois pas la nécessité de la garder chez vous.

Don Ambroise.

Elle n’a ni père ni mère, ni proches parens. Voulez-vous que je la laisse seule ? Une veuve, à son âge ! Eh ! ne me faites point parler.

Don Fernand.

Engagez-la à se marier.

Don Ambroise.

Oui, s’il se présentait une bonne occasion.

Don Fernand.

Rien de plus facile. Donna Eugénie a du mérite, ajoutez à cela une dot considérable…

Don Ambroise.

Quelle dot ? que parlez-vous, s’il vous plaît, d’une dot considérable ? Elle n’a presque rien apporté ici, et nous a coûté des sommes énormes. Voilà la note des dépenses faites pour l’illustrissime épouse : la voilà ! le jour elle ne quitte pas ma poche, et la nuit mon oreiller. La longue suite de mes disgraces n’est rien à mes yeux, en comparaison de toutes ses gentillesses. Oh ! mode ! maudite mode ! puisses-tu être une bonne fois à tous les diables ! Je veux être un coquin, si,