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Comédie.

Don Ambroise (au Procureur.)

Monsieur, il n’est plus question de l’écrit que nous devions passer. Mais faites, je vous prie, tout ce qu’il faut pour défendre ma pauvre existence. Ma belle-fille, après avoir dissipé sa dot en colifichets de toilette, veut me dépouiller encore du peu qui me reste.

Donna Eugénie (à Don Ambroise.)

En vérité, Monsieur, vos procédés m’étonnent.

Don Ambroise.

Et les vôtres m’indignent.

Le Chevalier.

Un moment, Messieurs ; laissez-moi dire deux mots, et voyons si je ne pourrai pas arranger tout cela à la satisfaction générale.

Le Comte.

Il en résultera un procès, et je m’engage à le soutenir pour donna Eugénie.

Le Chevalier.

Non, point de procès. Écoutez : Il n’est pas juste que le pauvre don Ambroise qui a tant dépensé déjà, se ruine totalement par la restitution d’une dot. Madame ne peut rester veuve ni se marier sans dot ; elle doit bien moins encore s’engager dans un procès long, ennuyeux, et dont les suites peuvent être funestes. Prenons un autre parti. Qu’elle épouse un galant homme qui puisse, pour le moment, se passer de sa dot ; que cette dot reste entre les mains de don Ambroise, sa vie durant, et que l’intérêt en courre à raison de quatre pour cent. Mais que cet intérêt encore demeure entre ses mains, tant qu’il vivra. À sa mort, la dot et tous les intérêts reviendront à Madame ou à ses héritiers ; et pour ne pas embarrasser la succession de don Ambroise dans des comptes difficiles à débrouiller, qu’il jouisse de tout pendant sa vie, et, puisqu’il n’a ni enfans ni neveux,