Page:Goldsmith - Le Vicaire.djvu/240

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mettre la jeune personne en lieu de sûreté, et, là, l’effrayer par des menaces. M. Thornhill surviendrait au même instant, comme par hasard ; ils se battraient un moment ; Baxter prendrait la fuite, et M. Thornhill aurait une magnifique occasion de se faire aimer de la jeune miss à titre de libérateur ! »

Sir William avait fréquemment vu cet habit porté par son neveu ; il se le rappela, et tout le reste se trouva, dans le plus grand détail, confirmé par le prisonnier lui-même. Sa conclusion fut que M. Thornhill lui avait souvent déclaré qu’il était amoureux des deux sœurs à la fois.

« Ciel ! s’écria sir William, quelle vipère j’ai nourrie dans mon sein. Et lui encore qui faisait l’homme si jaloux de voir justice se faire dans l’intérêt de tous ! mais on la lui fera. Monsieur le geôlier, assurez-vous de lui !… Un moment ; il n’y a pas, je le crains bien, de motif légal de l’arrêter. »

À ces mots, M. Thornhill supplia, du ton le plus humble qu’on puisse imaginer, que deux misérables de cette espèce ne fussent pas admis à déposer contre lui, mais que ses gens fussent interrogés. « Vos gens ! reprit sir William ; malheureux ! cessez de les appeler vos gens ! Mais, voyons un peu ce que ces gaillards-là ont à dire : qu’on appelle le maître d’hôtel ! »

Le maître d’hôtel, en entrant, eut bientôt reconnu, à l’air de son ancien maître, que le règne du Squire était passé. « Répondez, lui dit sir William d’un ton sévère, avez-vous jamais vu ensemble votre maître et ce drôle affublé d’un de ses habits ? — Oh ! mille fois, avec la permission de Votre Honneur ; c’est lui qui amenait toujours au Squire ses maîtresses !… » Le jeune Thornhill l’interrompit : « Comment ! devant moi… — Oui, devant vous et devant qui que ce soit ! Tout franc, monsieur Thornhill, je ne vous ai jamais ni aimé, ni approuvé, et peu m’importe ; je veux aujourd’hui vous donner un échan-