Page:Goncourt, L'Italie d'hier, 1894.djvu/155

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gonflées de paroles, dont elles soulagent leur chagrin bavard.

L’amour du Dante pour la Béatrice Portinari a fait naître un genre de poésie inconnue des Grecs et des Latins : une sorte de cantique laïque sur la divinité de l’amour, dont on ne trouve aucune trace dans Anacréon, Properce, Catulle.

Ils vont, ils vont, ils vont, les pantalons passant sous les dominos de calicot glacé ! ils vont dans un jupon, une camisole par-dessus, complétant le travestissement ! — parfois, rien qu’un soleil de papier doré dans le dos, faisant un turc ; et ils sont masqués, et ils tiennent la barbe de leurs masques, avec de vieux gants blancs qui ont fait des chaussures, et ils brandissent de petits fouets et des cravaches. Ils vont, ils vont… puis ils reviennent, repassent devant vous, toujours sautant, gambadant, se trémoussant. L’esprit, la saillie, le rire du mot, une langue en joie, le fouaillement des gens avec un rude bouquet d’orties : l’engueulement enfin, ils l’ont remplacé par un sempiternel hon ! hou ! — qui agace comme un gloussement de châtré, et dont dix mille gosiers fatiguent l’écho de la rue des Calzaioli.