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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/112

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Un jour de l’année 1774, le Roi, galant ce jour-là, avait dit à la Reine, — était-ce pour la consoler de ne pas donner le ministère à M. de Choiseul ? — « Vous aimez les fleurs ? Eh bien ! j’ai un bouquet à vous donner : c’est le petit Trianon[1]. »

Le petit Trianon était, à l’extrémité du parc du grand Trianon, un pavillon à la romaine, de forme carrée. Cette miniature de palais, qui n’avait guère que douze toises sur chacune de ses faces, se composait d’un rez-de-chaussée et de deux étages montant entre des colonnes et des pilastres d’ordre corinthien, joliment fleuris, parfaitement cannelés, et couronnés des balustres d’une terrasse italienne. L’architecte Gabriel l’avait élevé sous la surveillance du marquis de Menars. Le sculpteur Guibert y avait fait merveille de son ciseau. Le Roi, le vieux Roi Louis XV s’éprenait, en ses dernières années, de ce petit coin de son grand Versailles. Cette demeure était à sa taille, et il y avait ses aises. Il s’était plu à l’entourer d’un jardin botanique ; et là, parmi les mille parfums et les mille couleurs de la flore étrangère, presque ignorée alors de la France, promenant à petits pas les lendemains de ses débauches,

  1. Chronique secrète, par l’abbé Beaudeau. — La Reine, dit Mercy-Argenteau, désirait beaucoup avoir une maison de campagne à elle en propre. À la mort du Roi, le comte et la comtesse de Noailles lui suggérèrent l’idée de demander le petit Trianon, s’offrant de l’obtenir de Louis XVI. La Reine, sur le conseil de Mercy, s’adressait directement à son époux, qui au premier mot lui répondait que cette maison de plaisance était à elle, et qu’il était charmé de lui en faire don.