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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/196

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tout y mener, tout y ordonner, correspondant directement avec les fournisseurs, chargeant de recommandations et d’observations les mémoires du tapissier de la salle. C’était un coin de son petit royaume qu’elle entendait administrer elle-même, et où il lui plaisait de régner seule. Vain dépit du duc de Fronsac, vaines démarches pour faire entrer le théâtre de Trianon sous son autorité, sous cette main qui tenait tous les théâtres de Paris ; Marie-Antoinette faisait à toutes ses représentations, à toute sa correspondance la même réponse : Vous ne pouvez être premier gentilhomme quand nous sommes les acteurs ; d’ailleurs je vous ai déjà fait connaître mes volontés sur Trianon ; je n’y tiens point de cour, j’y vis en particulier[1]. Et la Reine veillait à toute usurpation, empêchait toute immixtion, et gardait sur ses plaisirs et sur son théâtre cette maîtrise absolue dont cette lettre de la collection du comte Esterhazy nous montre la jalousie et la clémence : « Mes petits spectacles de Trianon me paraissent devoir être exceptés des règles du service ordinaire. Quant à l’homme que vous tenez en prison pour le dégât commis, je vous demande de le faire relâcher… et puisque le Roi dit que c’est mon coupable, je lui fais grâce[2]. »

  1. Mémoires de Mme Campan, vol. I.
  2. Catalogue de lettres autographes du comte Georges Esterhazy. Paris, 1857.