Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/216

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lors du duel du comte d’Artois et du duc de Bourbon, ayant à parler à la Reine, il fut introduit par M. Campan dans une chambre où il y avait un billard qu’il connaissait pour y avoir joué souvent avec la Reine ; puis, de cette chambre, dans une chambre qu’il ne connaissait point, simplement mais commodément meublée. « Je fus étonné, dit M. de Besenval, non pas que la Reine eût désiré tant de facilités, mais qu’elle eût osé se les procurer[1]. » Ainsi une chambre qu’il ne connaît pas, à côté d’une chambre qu’il connaît, dans ce Versailles, dans cet autre Vatican aux huit cents chambres, voilà qui suffit à M. de Besenval pour soupçonner, que dis-je ? pour juger et condamner Marie-Antoinette. C’est faire trop bon marché de l’honneur d’une Reine et des exigences de la justice historique. Encore madame Campan explique-t-elle sans réplique possible la destination de cette chambre, qui était bien pis qu’une chambre, qui était un appartement composé d’une très petite antichambre, d’une chambre à coucher et d’un cabinet, et destiné à loger la dame d’honneur de la Reine dans le cas de couche ou de maladie, usage auquel il avait déjà servi[2].

M. de Besenval avait les meilleures raisons du monde pour s’étonner, s’indigner presque de si peu. Que disait-il à M. Campan en montant derrière lui les escaliers jusqu’à cette chambre mystérieuse ? « Mon cher Campan, ce n’est pas quand

  1. Mémoires du baron de Besenval, vol. II.
  2. Mémoires de Mme Campan, vol. I.