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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/274

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fatalité qui fait, à tous les coins du monde, tant d’ennemis à cette malheureuse princesse. Il verra qu’il est dans les intérêts et presque dans les nécessités de la politique européenne de refuser à Marie-Antoinette le bénéfice de l’appui moral, de la laisser désarmée et sans secours, de la ruiner par l’action continue et le langage commandé d’un corps diplomatique à peu près unanime ; de l’abandonner enfin à la révolution, et de permettre qu’elle meure.

L’Angleterre était au premier rang des puissances ennemies de la Reine. Elle n’avait cessé de l’avilir par ses agents. Elle avait accueilli les calomnies, recueilli les calomniateurs, toléré et encouragé à Londres les libelles et les outrages, payé à Paris les injures et les diffamations. Le cabinet de Saint-James voyait dans Marie-Antoinette une créature de la politique de M. de Choiseul, du ministre qui, le premier, avait inquiété la puissance anglaise en Amérique ; il voyait dans la Reine le lien de cette alliance des maisons d’Autriche et de France, qui pouvait arrêter les progrès et les conquêtes de sa politique envahissante. Marie-Antoinette, il est vrai, était loin d’avoir poussé à l’émancipation des colonies américaines. Si elle s’était laissé flatter par la gloire acquise par quelques Français sur les champs de bataille du nouveau monde, elle n’avait point cédé à l’engouement de Diane de Polignac[1]. Elle n’avait point cessé de déplorer ce secours donné à une insurrection républicaine, comme si elle eût eu

  1. Mémoires de Mme Campan, vol. I.