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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/297

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mort… C’est en vain que les femmes de la Reine frappent à la porte et redoublent de coups ; pendant cinq minutes rien ne répond. Enfin un domestique d’un valet de chambre du Roi vient ouvrir. La Reine se précipite dans la chambre du Roi : le Roi n’y est pas ! Il a couru chez la Reine par les escaliers et les corridors qui sont sous l’Œil-de-Bœuf. Mais voilà Madame et le Dauphin qui se jettent dans les bras de leur mère. Le Roi revient. Madame Élisabeth arrive. Quelles larmes, quelle joie de cette famille qui se retrouve[1] !

Bientôt tout ce qu’il y a de terreur dans le château, tout ce qui reste de fidélité dans Versailles, afflue et se presse dans cette chambre du Roi, entourée de clameurs et de bruits, du cliquetis des armes, de la voix du peuple. Les femmes se lamentent. Les ministres écoutent. Necker, abîmé dans un coin, pleure sa popularité. Les députés de la noblesse demandent les ordres du Roi. Le Roi se tait. La Reine seule console et encourage les hommes qui pâlissent. Sous les fenêtres, les cris augmentent : « À Paris ! à Paris ! » Le Roi se laisse décider par les supplications et les larmes. Il promet au peuple de partir à midi. Mais cela ne suffit pas au triomphe du peuple : il faut que la Reine aussi paraisse. Des cris l’appellent. La Reine paraît à ce balcon de l’appartement où Louis XIV a rendu le dernier soupir ! Elle paraît, le Dauphin et Madame royale à ses côtés. « Point d’enfants ! » ordonnent vingt mille

  1. Mémoires de Mme Campan, vol. II. — Mémoires de Rivarol.