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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/347

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se sacrifie, et que pourvu que son peuple et la nation trouvent le bonheur dans son acceptation, il n’hésite pas à la donner ; et la vue de ce bonheur lui fera bientôt oublier toutes les peines cruelles et amères qu’on a fait éprouver à lui et aux siens ; mais si l’on prend ce parti il faut y tenir, éviter surtout tout ce qui pourroit donner de la méfiance et marcher en quelque sorte toujours la loi a la main ; je vous promets que c’est la meilleure manière de les en dégoûter tout de suite. Le malheur c’est qu’il faudroit pour cela un ministre adroit et sûr, et qui, en même temps, eut le courage de se laisser abîmer par la cour et les aristocrates pour les mieux servir après ; car il est certain qu’ils ne reviendront jamais ce qu’ils ont été, surtout par eux-mêmes[1]. »

Puis au bout de sa lettre, emportée par le pressentiment de la vanité de toutes ces tentatives, aux abois dans le dédale des ressources et des moyens de salut, épouvantée du sommeil du Roi, de ce roi incapable de régner, au jugement du comte de la Marck[2], la mère arrache à la Reine un cri, un douloureux appel aux puissances étrangères.

« En tout état de cause, les puissances étrangères peuvent seules nous sauver : l’armée est perdue, l’argent n’existe plus ; aucun lien, aucun frein ne peut retenir la populace armée de toute part ; les chefs même de la Révolution, quand ils veulent parler

  1. Marie-Antoinette au comte de Mercy-Argenteau. Revue rétrospective, 2e série, vol. I.
  2. Le comte de la Marck au comte de Mercy, 28 septembre 1791. Revue rétrospective, 2e série, vol. II.