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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/422

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portait les lettres de la Reine. Au 10 août, M. de Jarjayes avait accompagné la famille royale dans la loge du Logotachygraphe. Le Roi mort, la Reine au Temple, il resta : il attendait[1].

Dans la prison même, le dévouement était auprès de la Reine. Un officier de bouche de l’ancienne cour, l’homme qui avait déjà sauvé la vie à la Reine aux journées d’octobre, en lui ouvrant la porte secrète des petits appartements, Turgy avait trouvé la grille du Temple ouverte quelques jours après le 10 août, et, de sa pleine autorité, avec la bonne fortune de l’audace, s’était installé au service de la famille royale. Ce fut le premier qui donna aux hôtes du Temple, non les nouvelles du dehors, mais quelques lambeaux de ces nouvelles. Aidé de Chrétien et de Marchand, employés comme lui à l’office du Temple, et comme lui jouant obscurément leur tête, il avait une adresse merveilleuse pour substituer, dans un tournant d’escalier, dans un passage noir, au bouchon d’une carafe de lait d’amande vérifié par les municipaux, un autre bouchon couvert d’avis écrits avec du jus de citron ou un extrait de noix de galle. Puis il transmettait au dehors, sur le même bouchon, la réponse de la Reine ou de Madame Élisabeth. Il avait encore concerté avec les prisonniers une correspondance muette par signes et par gestes. Avec le mouvement

  1. Mémoires de M. le baron Goguelat. Précis des tentatives qui ont été faites pour arracher la Reine à la captivité du Temple. Paris, Baudouin, 1813.