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Page:Goncourt - Histoire de Marie-Antoinette, 1879.djvu/443

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tête d’une patrouille, s’est lancé dans la rue, en se promettant une revanche[1].

Simon avait gardé la Reine à la Révolution contre M. de Batz ; la Tison l’avait gardée contre Toulan, et voilà que déjà sur celle-ci la main de Dieu s’est appesantie, avec des signes éclatants et terribles.

Un jour, la Tison se mit à parler toute seule. Cela fit rire Madame ; et sa mère la regardait complaisamment, tout heureuse d’entendre le rire de sa fille. Pauvre enfant ! c’était d’une aliénée qu’elle riait ! La Tison depuis longtemps languissait et ne voulait plus sortir. La maladie qui s’emparait tout à coup du Dauphin l’inquiétait et la troublait comme un reproche. Aujourd’hui elle est folle. Elle parle tout haut de ses fautes, de ses dénonciations, d’échafaud, de prison, de la Reine. Elle s’accuse, elle s’injurie. Elle croit morts ceux qu’elle a dénoncés. Tous les jours elle attend les municipaux accusés par elle, et, ne les voyant pas revenir, elle se couche dans les larmes. Ses nuits sont remplies d’épouvante ; et elle réveille les prisonnières avec les cris que lui arrachent d’affreux rêves. Elle se traîne tout le jour aux genoux de la Reine, pleurant et suppliant : « Je suis une malheureuse… Je demande pardon à Votre Majesté… Je suis la cause de votre mort ! » Sa fille, la Tison ne la reconnaît plus ! D’horribles convulsions la prennent : huit hommes peuvent à peine la contenir et l’emporter

  1. Mémoires historiques sur Louis XVII.