Page:Goncourt - Journal, t1, 1891.djvu/19

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annoncer à Paris la publication d’En 18.., et apprendre à la France et au monde les noms de deux hommes de lettres de plus : Edmond et Jules de Goncourt.

L’affiche manquait aux murs. Et la raison en était celle-ci : Gerdès, qui se trouvait à la fois — rapprochement singulier — l’imprimeur de la Revue des Deux Mondes et d’En 18.., Gerdès, hanté par l’idée qu’on pouvait interpréter un chapitre politique du livre comme une allusion à l’événement du jour, tout plein, au fond, de méfiance pour ce titre bizarre, incompréhensible, cabalistique, et qui lui semblait cacher un rappel dissimulé du 18 Brumaire, Gerdès, qui manquait d’héroïsme, avait, de son propre mouvement, jeté le paquet d’affiches au feu.

 

Nous étions bien aussi un peu sortis, il faut l’avouer, pour savoir des nouvelles de notre oncle, le représentant. La vieille portière de la rue de Verneuil, une vieille larme de conserve dans son œil de chouette, nous disait : « Messieurs, je lui avais bien dit de ne pas y aller… mais il s’est entêté… on l’a arrêté à la mairie du Xe arrondissement. » Nous voilà à la porte de la caserne d’Orsay, où avaient été enfermés les représentants arrêtés à la mairie. Des sergents de ville nous jettent : « Ils n’y sont plus. — Où sont-ils ? — On ne sait pas ! » — Et le factionnaire crie : « Au large ! »

Lundi 15 décembre. — Jules, Jules… un article de Janin dans les Débats ! C’est Edmond qui, de son lit,