Page:Goncourt - Journal, t2, 1891.djvu/224

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longues cannes blanches à la Tronchin, de lourds colliers d’ambre, de grosses boucles d’oreilles, comme en portent les femmes de la Halle, de petits chapeaux d’hommes, des manteaux rouges, des bottines jaunes à grelots, et toute la bigarrure et toute la fantaisie des étoffes écossaises et pyrénéennes, et sur ce carnaval de costumes du matin, la dominante du rouge et du blanc, tachant si joliment la plage blonde, la mer verte, le ciel bleu.

Quel merveilleux tableau pour un vrai peintre de la vie élégante, si le XIXe siècle en avait un !

— En littérature on ne fait bien que ce qu’on a vu ou souffert.

Juillet. — Le cidre une boisson qui fait rentrer en soi, qui rend sérieux, ferme et solide, qui fait la tête froide et le raisonnement sec, une boisson qui ne grise que la dialectique des intérêts. Après de la bière, on écrirait un traité sur Hegel ; après du champagne, on dirait des sottises ; après du bourgogne, on en ferait ; — après du cidre, on rédigerait un bail.

— Un livre n’est jamais un chef-d’œuvre, il le devient. Le génie est le talent d’un homme mort.

7 août. — Ce soir il y avait bal au Casino. Elle avait mis un corsage décolleté, au décolletage qui montre le tendre entre-deux des seins.

Nous sommes sortis ensemble. Elle était moitié