Page:Goncourt - Journal, t2, 1891.djvu/42

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

Puis de là, à un moment, on descend aux mystères des sens, à l’inconnu des goûts bizarres, des tempéraments monstrueux. Les fantaisies, les perversions, les toquades, les démences de l’amour charnel sont étudiées, creusées, analysées, spécifiées. On philosophe sur de Sade, on théorise sur Tardieu. L’amour est couché sur une table d’amphithéâtre et les passions passées au speculum. On jette enfin dans ces entretiens, qu’on pourrait appeler les cours d’amour scientifiques du XIXe siècle, les matériaux d’un livre sur l’amour, qu’on n’écrira peut-être jamais, et qui serait pourtant un beau livre : l’Histoire naturelle de l’Amour.

— La vie est hostile à tous ceux qui ne suivent pas le grand chemin de la vie, à tous ceux qui ne rentrent pas dans les cadres de la grosse armée régulière, à tous ceux qui ne sont ni fonctionnaires, ni bureaucrates, ni mariés, ni pères de famille. À chaque pas qu’ils font, toutes sortes de grandes et de petites choses tombent sur eux, comme les peines afflictives d’une grande loi de conservation de la société.

21 mai. — Quand le passé, religieux et monarchique sera entièrement détruit, peut-être commencera-t-on à juger le passé littéraire, et peut-être arrivera-t-il qu’on trouvera qu’un Balzac vaut Molière, et que Victor Hugo est le plus grand de tous les poètes français.

Dimanche 8 juin. — Nous allons à la campagne