Page:Goncourt - Journal, t2, 1891.djvu/79

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En face de la Muette, sur les terrains de l’ancien Ranelagh, — j’ai reconnu la maison sans la connaître, — ça ressemble aux tâtonnements des enfants avec les jeux d’architecture, et où ils marient des tours à créneaux avec un kiosque chinois. Nous entrons. Il y a des fleurs partout, des plats de Chine dans les plafonds, des Watteau peints par Ballue, des vitrines pleines de dunkerques, du carton-pierre, des tentures de lampas, des stores peints, des tapis comme de la mousse, des reliures surdorées, des portes, couvertes, de bas en haut, de dessins, de lithographies, de photographies à deux sous, un salon de jeux avec des billards polonais et des toupies hollandaises, et des montées, des descentes, des machinations de dégagements qui ressemblent à une intrigue de vaudeville, et partout des objets d’art à ravir une fille : une maison triomphante avec jardin, écurie et remise, que vous montre un homme lugubre et gêné et tristement aimable, — que vous montre Jules Lecomte.

1er  décembre. — Nous allons remercier Sainte-Beuve de l’article qu’il a fait ce matin, dans le Constitutionnel, sur la Femme au XVIIIe siècle.

Sainte-Beuve demeure rue Montparnasse. La porte, une toute petite porte, nous est ouverte par la gouvernante, une femme de quarante ans, à tenue d’institutrice de bonne maison. On nous introduit dans un salon à papier grenat, aux meubles en velours rouge, aux formes Louis XV d’un tapis-