Page:Goncourt - Journal, t3, 1888.djvu/50

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rure rouillée, cachée dans un mur, je voudrais entrer dans un parc que je ne connaîtrais pas, un parc ombreux, mystérieux. Peu ou point de lune. Un petit pavillon ; dedans une femme que je n’aurais jamais vue et qui ressemblerait à un portrait que j’aurais vu dans un musée. Un souper froid, une causerie où l’on ne parlerait d’aucune des choses du moment ni de l’année présente. Un sourire de Belle au Bois dormant, point de domestiques… Et s’en aller, sans rien savoir, comme d’un bonheur, où on a été mené, les yeux bandés, et ne pas même chercher après, la femme, la maison, la porte, parce qu’il faut être discret avec un rêve… Mais jamais, jamais, cela ne m’arrivera !

Et cette idée me rend triste.

30 mars. — Lu dans un journal une lettre de Louis Blanc, qui me semble vraiment bien préoccupé de l’action sur le public de notre Histoire de la Société française pendant la Révolution. Il s’essaye à prouver, contre nous, que la guillotine a augmenté le nombre des équipages à Paris.

On n’a pas assez de temps dans notre métier pour répondre aux paradoxes, quand ils sont trop bêtes.

— Saint-Victor me contait ce mot d’un très illustre juif, auquel un ami demandait, à la fin d’un dîner où