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Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/199

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choses dont se soutiennent, s’alimentent, vivent les populations malaisées, les pommes de terre et le fromage : le fromage, il est à l’état de souvenir, et les pommes de terre, on a besoin de protection pour s’en procurer à vingt francs le boisseau. Du café, du vin, du pain : c’est la nourriture de la plus grande partie de Paris.

Ce soir, au chemin de fer, je demande mon billet pour Auteuil. La buraliste me dit que le chemin de fer, à partir d’aujourd’hui, ne va plus qu’à Passy. Auteuil ne fait plus partie de Paris.

Dimanche 8 janvier. — Cette nuit, je me demandais, sous mes rideaux, s’il faisait un ouragan. Je me suis levé, j’ai ouvert ma fenêtre. L’ouragan était l’incessant et continu sifflement des obus, passant au-dessus de ma maison.

Je vais un moment étudier la physionomie d’Auteuil. Devant la gare, des gamins en képi militaire vendent à des gardes nationaux des fragments d’obus, qu’ils vont, à tout moment, ramasser près du cimetière. Dans les rues, des promenades patrouillantes de gardes nationaux, de douaniers, de forestiers, se fondant chez les marchands de vin. Beaucoup de messieurs qui déménagent, un sac de voyage à la main. Je vois une toute vieille dame, aux blanches anglaises, appuyée sur le bras d’un homme en blouse, qui porte son sac de nuit à la main. On stationne devant la maison du pâtissier Mongelard, dont un