Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/206

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seul moyen pratique de retenir la hausse dans des limites raisonnables.

Je voyais, ce soir, chez un restaurateur, le découpoir du maître d’hôtel faire à peu près 200 tranches dans un cuissot de veau, d’un veau découvert à un quatrième étage, peut-être du dernier veau existant à Paris. Deux cents tranches, à 6 francs, de la grandeur et de l’épaisseur d’une carte de visite, ça fait 1 200 francs.

Un dialogue à côté de moi.

— « Nos femmes nous ont abandonnés, ce soir. »

— « Ma foi, tant mieux, nous irons voir le Panthéon, le bombardement ! »

La visite aux quartiers bombardés a remplacé le théâtre.

Cette nuit, je passe une partie de la nuit à ma fenêtre, empêché de dormir par la canonnade et la fusillade autour d’Issy. Dans le silence de la nuit, cela paraissait proche, proche, et, avec l’imagination des heures de peur et de trouble, il me semblait, un moment, que les Prussiens avaient pris le fort qui ne tirait plus, et qu’ils attaquaient le rempart.

Samedi 14 janvier. — Le suffrage universel, pour l’élection des officiers de la mobile, a été déplorable. Il a fait nommer les bons enfants : c’est-à-dire des officiers qui, lorsqu’ils n’encouragent pas tout, n’empêchent rien.

M. Dumas, l’industriel, me contait ce matin de