Page:Goncourt - Journal, t4, 1892.djvu/295

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tion au sentiment qui fait sa puissance incontestable. Les franchises municipales, l’autonomie de la Commune, etc., etc. : tout le nuage métaphysique dans lequel elle se tient, propre à satisfaire quelques idéologues de cabaret, n’est pas cela qui lui donne une action sur les masses. Sa force lui vient absolument de la conscience, que le peuple a d’avoir été incomplètement et incapablement défendu par le gouvernement de la Défense nationale. Si donc la Commune, au lieu de se montrer plus complaisante aux exigences prussiennes que Versailles lui-même, avait rompu le traité qu’elle reproche à l’Assemblée, si elle avait déclaré la guerre à la Prusse, dans une folie furieuse de l’héroïsme, M. Thiers était dans l’impossibilité de commencer son attaque, il ne pouvait travailler à la reddition de Paris avec le concours de l’étranger.

Maintenant, si la résistance avait été énergique, si deux ou trois petits succès de rien avaient inauguré cette tentative — dira-t-on impossible — savez-vous ce qui serait arrivé ? M. Thiers, pas plus que ses généraux, n’eût été maître de ce mouvement, et tout le pays aurait été entraîné dans une reprise à outrance de la guerre. En tous cas, la mort de la Commune, dans ces conditions, eût été une grande mort, une mort qui eût fait faire un rude chemin aux idées, qu’elle abritait sous son drapeau.

Mme Burty, que je trouve seule, occupée nerveusement à faire briller les bronzes japonais de la petite vitrine, m’entretient tristement de la surexcitation