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Balzac m’a dit : “Cette femme ment, je n’ai pas de sœur à l’hôpital.” Ma foi, cette femme m’intéressait, j’ai de ma poche acheté le cercueil. »

Les années se passent, le peintre et le directeur d’hôpital voisinent, comme par le passé. Un matin, le directeur arrive chez Giraud, tout bouleversé : « Vous vous rappelez mon histoire de la sœur de Balzac, hein ?… Vous ne savez pas ce qui vient de m’arriver ?… Balzac m’a fait demander aujourd’hui… Je l’ai trouvé mourant, ainsi que les journaux l’annonçaient : “Monsieur, s’est-il écrié, en me voyant, je vous ai dit que cette femme pour laquelle vous êtes venu me demander un cercueil, n’était pas ma sœur, c’est moi qui ai menti. J’ai voulu vous avouer cela, avant de mourir.”[1] »

Dimanche 8 février. — Ce soir, en dînant chez Flaubert, Alphonse Daudet nous racontait son enfance, une enfance hâtive et trouble. Elle s’est passée au milieu d’une maison sans argent, sous un père changeant tous les jours d’industrie et de commerce, dans le brouillard éternel de cette ville de Lyon, déjà abominée par cette jeune nature amou-

  1. Le récit a un caractère de vérité, mais quelle est cette sœur, dont les biographes ne parlent pas ? Est-ce une sœur naturelle ? Ne serait-ce pas plutôt une belle-sœur ? — La véracité de mon récit a été confirmée par un article d’Arsène Houssaye, dans le Figaro et l’Écho de Paris.