Page:Goncourt - Journal, t5, 1891.djvu/136

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en langage de danseuse, d’une de leurs arabesques, — et c’est vraiment très amusant de le voir, les bras arrondis, — mêler à l’esthétique du maître de danse, l’esthétique du peintre, parlant du boueux tendre de Vélasquez et du silhouetteux de Mantegna.

Un original garçon que ce Degas, un maladif, un névrosé, un ophtalmique à un point, qu’il craint de perdre la vue, mais par cela même un être éminemment sensitif, et recevant le contre-coup du caractère des choses. C’est jusqu’à présent l’homme que j’ai vu le mieux attraper, dans la copie de la vie moderne, l’âme de cette vie.

Maintenant réalisera-t-il jamais quelque chose de tout à fait complet ? Je ne sais. Il me paraît un esprit bien inquiet.

De cet atelier, je suis tombé à la nuit tombante dans l’atelier de Galland, le peintre-décorateur, dans cet atelier qui, en sa grandeur de cathédrale et avec son peuple mythologique de petites maquettes, au milieu de ses grisailles mourantes, semblait s’ouvrir à l’éveil crépusculaire d’un Olympe de Lilliput, ressuscitant la nuit.

Dimanche 22 février. — Je vais dire un bonjour à de Chennevières, que je n’ai pas vu depuis sa nomination à la direction des Beaux-Arts, craignant un peu qu’à sa porte, on ne m’apprenne qu’il habite