Page:Goncourt - Journal, t6, 1892.djvu/43

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Lundi 1er juillet. — Des drapeaux, on ne voudra jamais croire cela, on en a mis hier aux corbillards emportant leurs morts au cimetière.

―――― C’est curieux, ce besoin de dramatique qu’a l’humanité. Elle s’ennuie, en ouvrant son journal, quand il ne parle pas d’une guerre, ou au moins de l’assassinat d’un souverain.

Mercredi 17 juillet. — Aujourd’hui, j’ai eu à déjeuner le ménage Daudet, à la première sortie de relevailles de Mme Daudet, et les Charpentier, et Burty, dont le ventre devient bedonnant et le dos montagneux.

Daudet a été charmant. Il a une conversation qu’on ne peut définir que par un mot : une conversation d’improvisateur. C’est un mélange de petites choses gentilles, de fines observations, de remarques drolatiques d’imaginations poétiquement funambulesques. Il fallait l’entendre couper le littéraire de sa conversation, par des blagues sur la nourrice morvandiste qu’il a découverte, et sur son dernier-né, qu’il appelle Tardivaux, à l’indignation de sa femme.

Jeudi 18 juillet. — En réfléchissant combien mon frère et moi, nous sommes nés différents des autres,