Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

Vendredi 11 décembre. — Le général Schmitz soutenait qu’il était impossible de raisonner de la guerre, et que même ceux qui y avaient été, ne pouvaient pas raconter avec certitude ce qui s’y était passé.

À ce propos, il citait, le soir de Magenta, sa rencontre avec le général Regnault de Saint-Jean-d’Angély qui avait soutenu l’effort de la bataille, tout le jour, et croyant le succès de la journée compromis, et ne pouvant admettre que Mac Mahon fût entré à Magenta.

La bataille d’Inkermann lui fournissait encore cette anecdote.

Le soir, il se trouvait avec Canrobert, lord Raglan, et un général anglais dont je n’ai pas retenu le nom, un général élégantissime, parlant le français assez mal, mais avec un accent d’incroyable du Directoire, et qui attirait l’attention de Canrobert sur les mouvements de l’armée russe dans l’éloignement et l’effacement de la nuit tombante, et s’écriait à un moment : « Est-ce que vous ne croyez pas, général, que ce serait le moment de se mettre à la poursuite des Russes… Je crois bien qu’on pourrait les détruire ? » Sur ces paroles, Canrobert se retournait vers lord Raglan, lui disant : « Ne serait-ce point votre avis, mylord ? » À quoi lord Raglan répondait : « Peut-être, peut-être, mais il est plus prudent d’attendre à demain matin. »

Le lendemain, l’armée russe avait effectué sa retraite, et évité une extermination. Et le lendemain