Page:Goncourt - Journal, t7, 1894.djvu/332

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vous démontrer que mes tableaux n’ont pas été choisis, si à l’aveuglette, que vous le dites, et, que l’homme qui veut bien écouter la pièce, y trouvera cette perversion de l’affectivité, qui, selon vous, manque. Prenons la question de plus haut.

Vous avez été toujours, Monsieur, un étonnement pour moi, par le bouleversement, que vous avez porté dans la conception que je m’étais faite du normalien, car je dois vous l’avouer, je voyais dans le normalien, un homme tout nourri des beautés et des délicatesses des littératures grecque et latine, et allant dans notre littérature, aux œuvres d’hommes, s’efforçant d’apporter, autant qu’il était en leur pouvoir, des qualités semblables, et tout d’abord une qualité de style, qui, dans toutes les littératures de tous les temps et de tous les pays, a été considérée comme la qualité maîtresse de l’art dramatique.

Mais non, ce que vous admirez, avec le plus de chaleur d’entrailles, et qui, selon votre expression, ne vous laisse pas un fil de sec sur le dos, c’est le plus gros drame du Boulevard du Crime, ou la jocrisserie, au comique le plus épais. C’est pour ces machines-là que vous avez le rire le plus large et la plume la plus enfiévrée d’éloge. Car parfois vous êtes un peu dur même avec Augier, Dumas et les autres… et n’aviez-vous pas près de cinquante ans, quand vous vous êtes aperçu du talent de Victor Hugo, et que vous avez bien voulu vous montrer bonhomme, à son égard ?

Oui, Monsieur, vous ne semblez pas vous douter, mais pas vous douter du tout, que dans la scène de