Page:Goncourt - Journal, t9, 1896.djvu/114

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Dimanche 22 janvier. — Aujourd’hui, les Rosny m’entretiennent longuement de l’hostilité haineuse du public à mon égard. Je ne puis m’empêcher de leur dire, dans un petit accès de nervosité : « Vous allez trouver que c’est prétentieux, eh bien, j’attribue cette disposition du public, à ce que, dans le moment, en France, on commence à avoir horreur et peur de l’honnêteté, qui devient gênante pour la masse du public, du public qui n’a pas à apporter dans ma vie, ou dans mon métier, l’indulgence pour une action basse, pour une faiblesse, pour une trahison de principe… car je crois être le type de l’honnête homme littéraire, du persévérant dans ses convictions, et du contempteur de l’argent… et j’oserai affirmer que je suis le seul, l’unique lettré de l’heure présente, qui, avec l’autorité de mon nom, ayant pu faire encore pendant dix ans, des romans bons ou mauvais, mais très bien payés, ne les a pas faits, dans la crainte qu’ils fussent inférieurs à ceux écrits, dans les années antérieures. »

Mardi 24 janvier. — Hier, on me contait une singulière histoire de tatouage. Une femme de Bogora, en Algérie, éprise follement d’un vétérinaire français, ne trouvait rien de mieux pour lui attester sa tendresse passionnée, que de se faire tatouer sur la poitrine, les différents fers à cheval, pris dans un livre technique de la bibliothèque du vétérinaire,