Page:Goncourt - Madame Gervaisais, 1869.djvu/104

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ment lasse à porter l’élancement de sa taille, ses épaules abattues, son long cou, elle écoutait légèrement, un peu distraite et comme avec le seul sourire de sa figure, la causerie brisée du petit cercle assis sur des siéges où étaient représentées en tapisserie les Vertus théologales. Les paroles s’arrêtaient. La conversation avait des pauses de repos semblables à la dégustation d’un sorbet. Et il se faisait, de moment en moment, ces silences des salons italiens qui laissent tomber le temps, et paraissent heureusement l’écouter couler.

Dans cet intérieur, fermé aux étrangers, jaloux de son intimité, à la façon de la haute aristocratie romaine, peu de monde venait le soir. Toute la société, c’était un peintre du pays, quelques princes romains parents ou alliés, de jeunes cousines aux traits fins des Hérodiade du Vinci, et deux Cardinaux familiers de la maison, qu’on voyait entrer, leur chapeau à ganse rouge et or jeté sous le bras, avec une désinvolture de vieux marquis : ils prenaient place sur leurs grands fauteuils accoutumés, tout