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Page:Goncourt - Outamaro, 1891.djvu/116

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L’ART JAPONAIS

Puis c’est l’intérieur de la maison[1], pendant les heures inoccupées, où on voit les femmes dans des poses lasses, agenouillées sur le rebord de la grande baie, regardant stupidement le paysage, ou assis sur ce rebord, le dos tourné à la rue, s’étirant nerveusement, ou penchées sur des terrines, mangeant goulûment de petits crabes bouillis, pendant que dans le fond on en voit une, le corps déhanché, le cou tordu, la bouche grande ouverte, son petit nez ridicule en l’air, et ses sourcils en accents circonflexes, dans son délire musical, s’égosiller

  1. Voici l’assez triste tableau, que fait M. Rodolphe Lindan d’une de ces expositions, dans son Voyage autour du Japon, publié en 1864 : « Nous nous étions approchés d’une de ces djorodja, et à travers les barreaux de la grille, nous distinguâmes une salle spacieuse, garnie de nattes en bambou, et faiblement éclairée par quatre grandes lanternes en papier de couleur. À nos côtés, se trouvaient une douzaine de Japonais qui, la figure collée contre la grille, examinaient, comme nous, ce qui se passait dans la salle. Il y avait là, huit jeunes filles magnifiquement habillées de longues robes d’étoffes précieuses, accroupies sur leurs talons, suivant l’usage du Japon. Elles demeuraient droites et immobiles, les yeux attachés sur la grille qui nous séparait d’elles, et ayant dans leurs regards brillants, cette fixité particulière à ceux qui ne se rendent pas compte de ce qu’ils voient. Leurs beaux cheveux, d’un noir de jais, étaient arrangés avec art et ornés de