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Page:Goncourt - Quelques créatures de ce temps, 1878.djvu/110

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enfance passée chez les jésuites lui revenaient dans la conscience ; et comme un évadé du purgatoire menacé d’une extradition, le glorieux paillard de tout à l’heure, étourdi, se persuadant que l’omnibus allait sur lui-même comme un toton, Ourliac disait à demi-voix, d’un ton effrayé : « Voilà sept fois que ce cocher fait tourner la voiture ; et cependant je ne l’ai pas mérité ! »

À ces petites fêtes sous les treilles de la banlieue, quand il s’agissait de payer l’écot, Ourliac n’avait jamais que quarante sous dans sa poche. C’était le « nec plus ultra » de son appoint. On parfaisait le compte et tout était dit pour les amis d’Ourliac, mais non pour Ourliac. Il prenait de ces petites générosités subies, dont il ne devait rancune qu’à son avarice, une amertume et une âcreté de ressentiment qui devait plus tard éclater dans Collinet. Écoutez avec quelle vivacité et quel fiel amassé il met certains souvenirs dans son héros : « Il se sentait à certains égards au-dessous de ces jeunes gens bien vêtus qui lui faisaient politesse. Il se crut, du moins, obligé de les divertir. Il les défrayait du reste par des