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Page:Goncourt - Quelques créatures de ce temps, 1878.djvu/123

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pour que cette créature quitte la maison. Je reviendrai dans huit jours.»

Le jour même, Bénédict alla louer une petite chambre faubourg du Temple. Un ami le mena chez un juif du quai de la Tournelle, qui, moyennant des billets payables à sa majorité, lui fournit un mobilier en noyer de 700 fr. Bénédict s'installa là-dedans avec Jenny.

L'argent du père s'arrêta; et la misère frappa, brutale, au logis. La femme qui jadis ne fatiguait ses doigts qu'à porter des bouquets, se mit à piquer des selles de luxe et à colorier des images, se levant au matin pour ne cesser de travailler que l'aiguille ou le pinceau lui tombant des mains de fatigue, à onze heures ou minuit. Bénédict trouva à occuper sa journée au télégraphe qu'essayait alors de monter l'abbé Gonon. Il gagnait cent sous par jour, et le soir il pliait des enveloppes qui lui étaient payées 3 fr. le mille. Pourtant, en cette dure vie, et en cette chambre ouvrière, l'amour mettait des chansons. Un ou deux de leurs anciens camarades venaient encore le soir, et alors on se contait, à un petit feu avare de cotrets, quelques souvenirs des a