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Page:Goncourt - Quelques créatures de ce temps, 1878.djvu/267

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copie,--Marius revenait avec huit francs dans sa poche. Huit francs! Pécaïre! Huit francs! une fortune! Huit francs!! Si Marius eût dû jamais connaître l'orgueil, il l'eût fait ce soir-là. Il était tard! Marius trouva la friturière où il dînait fermée. Marius remonta gaiement la rue Saint-Jacques. Il arriva ainsi chez Tonnelier. Il dîna, il but du vin. Marius d'ordinaire ne buvait que de l'eau. Le lendemain, aux premières fraîcheurs du matin, Marius se retrouva dans un terrain vague, près de la barrière du Maine, le corps meurtri, la tête troublée, avec ses bottes aux pieds et sa chemise au dos,--rien de plus. Marius avait l'inexpérience du vin. Il s'était grisé; on l'avait battu, on l'avait volé, et là-dessus il s'était endormi. Marius reprit le chemin de son chez lui, donnant à regarder aux laitières sans le savoir, essayant de voir clair dans son histoire et ne s'y reconnaissant pas trop, la langue épaisse, les jambes molles. Il n'était pas encore assez dégagé pour comprendre ses infortunes et son peu de costume. La portière de l'hôtel de Grèce, en l'apercevant, partit d'un éclat de rire. Le pauvre Marius ouvrit