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OBLOMOFF.

quoi c’est à lui plutôt qu’à son maître de l’attaquer.

Mais en revanche, s’il avait fallu, par exemple, veiller toute la nuit, sans fermer l’œil, au chevet du barine, et que de là eût dépendu sa santé, ou même sa vie, Zakhare se serait infailliblement endormi.

Non-seulement il ne montrait aucune servilité dans ses rapports avec le barine, mais il était même d’un commerce familier et tant soit peu grossier : il se fâchait contre lui, sérieusement, à propos de rien, et même, comme nous l’avons dit, le calomniait sur la porte ; mais cela ne prouvait pas que ce dévouement fraternel, cet amour filial s’amoindrît : il n’était que momentanément voilé.

Ce sentiment, Zakhare l’éprouvait, non-seulement pour Élie Oblomoff, mais pour toute personne qui appartenait à la famille de son maître, pour tout ce qui lui était cher ou proche. Peut-être même ce sentiment était-il en contradiction avec sa manière de voir sur la personne d’Oblomoff ; peut-être Zakhare avait-il puisé d’autres convictions dans l’étude de son caractère.

Si on avait voulu montrer à Zakhare lui-même la profondeur du dévouement qu’il ressentait pour son maître, il l’aurait probablement contesté. Il aimait Oblomofka comme un chat son grenier, un cheval sa stalle, un chien la niche où il est né et où il a grandi.