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OBLOMOFF.

— Eh bien ! pourquoi ne pas sortir ? fit observer Zakhare : pourquoi ne pas s’absenter toute une journée ? Ce n’est pas sain de rester ainsi enfermé. Voyez comme vous avez mauvaise mine ! Jadis vous étiez frais comme un jeune concombre, et maintenant que vous êtes toujours assis, Dieu sait à quoi vous ressemblez. Vous devriez vous promener un peu dans les rues, voir le monde ou autre chose…

— As-tu fini, moulin à sottises ? dit Oblomoff ; écoute plutôt : se promener dans les rues !

— Oui, certainement, continua Zakhare avec chaleur. On dit qu’il vient d’arriver un monstre dont on n’avait jamais ouï parler : vous devriez aller voir ça. Vous devriez aller au spectaque, au bal masqué, et on déménagerait ici sans vous.

— Ne dis pas de bêtises ! Comme tu t’inquiètes du repos de ton barine ! S’il t’en croyait, il irait flâner toute la journée. Qu’est-ce que cela te fait que je dîne Dieu sait où et comment, et que je ne puisse m’étendre un peu après le dîner ? Ils déménageront ici sans moi ! On n’a qu’à ne pas les surveiller, et ils auront bientôt déménagé des débris. Je le sais bien, continua Oblomoff avec une conviction de plus en plus profonde, ce que veut dire un déménagement ! Cela veut dire bruit, meubles en pièces ; tous les objets sont entassés par terre : ici est le porte-manteau, et le dossier du sofa, et les tableaux, et les chibouques et les livres,