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OBLOMOFF.

un troisième cherche la fraîcheur sous le vestibule, un autre enfin, de son mouchoir voilant son visage contre les mouches, s’endort là où l’abat la chaleur, où l’a fait choir le repas pantagruélique.

Et le jardinier s’est étendu sous un buisson, dans le jardin, près de sa pelle, et le cocher dort dans l’écurie. Élie jette un coup d’œil dans la chambre des domestiques : là, tous sont couchés les uns à côté des autres, sur les bancs, sur le plancher et dans le vestibule, laissant les garçonnets à eux-mêmes : les marmots rampent dans la cour et grouillent dans le sable.

Et les chiens se sont blottis au fond du chenil, heureux qu’il n’y ait personne contre qui aboyer. On peut traverser la maison d’un bout à l’autre sans y rencontrer âme qui vive. Il aurait été facile de tout voler, même de tout emporter sur des charriots : personne ne l’eût empêché ; mais il n’y avait pas de voleurs dans ce pays.

C’est un sommeil qui embrasse tout d’une étreinte invincible, véritable image de la mort. Tout est mort, et pourtant de chaque coin s’élève un ronflement varié sur tous les tons et dans toutes les cadences.

Parfois quelqu’un relève sa tête en dormant, promène çà et là un regard hébété d’étonnement, se retourne sur l’autre flanc, ou, sans ouvrir les yeux, crache à demi éveillé, et, après avoir fait du bruit en