Page:Gorki - Contes d Italie.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
36
CONTES D’ITALIE

au danger. J’essayais de ramer, je faisais tout ce qu’il importe de faire en mer à l’heure du danger, lorsque ce vent, haleine des méchants démons, nous creuse amicalement mille tombes et chante le Requiem sans qu’il nous en coûte rien.

— Reste tranquille, Guido, dit mon père avec un sourire et en secouant l’eau qui tombait sur sa tête. À quoi bon brasser la mer avec des allumettes ? Épargne tes forces, mon fils, sinon on t’attendra en vain à la maison.

Les flots se renvoyaient l’un à l’autre notre petite embarcation, comme des enfants jouant à la balle ; ils venaient nous faire visite en passant par-dessus bord ; ils s’élevaient au-dessus de nos têtes, en hurlant ; nous tombions dans des trous profonds, nous montions sur des crêtes écumeuses, et la terre ferme s’éloignait de nous toujours davantage. Mon père me dit :

— Guido, tu parviendras peut-être vivant au rivage, moi pas : écoute ce que je vais te dire…