l’exprimer et elle regardait son fils avec des yeux brillant d’une douleur aiguë et ardente…
— C’est bon, maman ! Pardonne… J’ai tort ! chuchota Pavel en baissant la tête. Il lui jeta un coup d’œil rapide en souriant ; puis il ajouta en se détournant, confus, mais apaisé :
— Je ne l’oublierai jamais, parole d’honneur !
L’écartant d’elle, Pélaguée passa dans la chambre et fit d’une voix suppliante, à André :
— André, ne le grondez pas !… Je sais bien que vous êtes l’aîné… mais…
Le Petit-Russien, qui lui tournait le dos, ne bougea pas et se mit à crier d’une voix bizarre et comique :
— Hou ! hou ! hou ! Si, je le querellerai… je le rosserai même !
La mère se dirigea lentement vers lui, la main tendue et dit :
— Mon bon ami !…
Le Petit-Russien se détourna, pencha la tête en avant comme un taureau et s’enfuit à la cuisine, les mains cachées derrière le dos. Sa voix résonna bientôt, ironique et sombre :
— Va-t-en, Pavel, si tu ne veux pas que je t’arrache la tête !… Je plaisante, petite mère, ne me croyez pas ! Je prépare le samovar ! Oui, parfaitement… Il est mauvais, notre charbon… il est humide… qu’il aille à tous les diables !
Il se tut. Lorsque la mère rentra dans la cuisine, il était assis sur le sol et allumait le samovar. Sans la regarder, il reprit :
— N’ayez pas peur, petite mère, je ne le toucherai pas ! Je suis bon et doux… comme un navet bouilli… Et moi aussi, je l’aime ! N’écoute pas, toi, le héros ! Mais c’est son gilet que je n’aime pas… Il a mis un gilet neuf, voyez-vous, et qui lui plaît beaucoup ; il marche le ventre en avant et pousse tout le monde afin qu’on voie bien son gilet ! Il est joli, c’est vrai, mais à quoi bon bousculer son prochain ! Il y a déjà si peu de place !
Pavel demanda en souriant :
— Grogneras-tu encore longtemps ? Tu m’as déjà fait des remontrances, ça suffit…
Le Petit-Russien, toujours assis à terre, avait placé entre ses jambes le samovar et le contemplait. La mère,