Dieu, dis-je, donnez-moi un verre d’eau »… Un homme compatissant m’apporte à boire.
« Mais le policier fait circuler : « Va-t’en, va-t’en, ne te vautre pas ici ».
« Pendant un moment, je me promène devant la prison. Ensuite, je décide d’agir par la ruse. Je demande l’adresse de l’infirmier…
« — Par là, me dit-on, dans cette maisonnette.
« J’entre… Je vois une jeune femme. Des traits doux. Je l’interroge : « J’ai un fils, Piotr ; vit-il ? »
« — Vous avez de la chance, dit-elle, on a eu de la peine à le sauver »… Ce que j’ai pu être heureuse…
La mère nous raconte des épisodes remarquables de son existence passionnante. Elle parle, en termes chaleureux et caressants, de l’écrivain Gorki qu’elle a connu tout gosse. « Il était bien vif, Lionia… il était toujours fourré dans les livres et apprenait l’allemand. Je suis allé plus d’une fois à la teinturerie des Kachirine[1]. »
Je m’informe de la santé d’Anna Kirillovna. « Mes forces diminuent… Par ailleurs, ça va. Ce que j’aime, c’est lire. Les vieilles de mon âge me reprochent mon goût pour la lecture… »
Lorsqu’elle apprend que je vais voir son fils, Piotr Zalomov, elle me tend les grosses chaussettes tricotées et dit en souriant :
— Donne-les à Pétia, mon petit. Dis-lui que je l’aime et que je pense à lui…
1935
- ↑ Les grands-parents de Gorki.